Une langue orale et écrite

On entend encore souvent répéter un vieux cliché qui dit que « le patois ça ne s’écrit pas, ça se parle » ou que ce serait une langue essentiellement orale… Rien n’est plus faux.

Dès le XIIe siècle, des éléments de notre langue arpitane/Francoprovençale sont identifiables dans différentes chansons de geste et romans médiévaux, tels que l’Alexandre d’Albéric de Besançon (ou Pisançon ?) et le Girart de Roussillon, entre autres.

Depuis le XIIIème siècle, de nombreux auteurs ont écrit en savoyard et une vraie littérature s’est développée depuis l’époque médiévale.

Dans les années 1280-1300, entre le Beaujolais et la Dombes, la moniale Marguerite d’Oingt écrit des textes religieux dans lesquels elle raconte ses Méditations et La Vie de sainte Béatrice d’Ornacieu.

Vers 1410-1420, un auteur resté anonyme rédige en savoyard un mystère (pièce de théâtre religieux) mettant scène saint Nicolas et ses miracles dans les Ludi Sancti Nicholai.

En 1555, dans un duché de Savoie occupé et annexé par François Ier, c’est le musicien mauriennais Nicolas Martin qui fait imprimer un ensemble de Noëlz et chansons nouvellement composez tant en vulgaire françoys que savoysien dict patoys, pour en citer le titre complet…

Cette littérature atteindra son apogée à la fin du XIXème siècle, avec des auteurs dont l’un des plus importants est une femme : Amélie Gex, poétesse de la région chambérienne. Dans le même temps, les philologues Aimé Constantin et Joseph Désormaux s’efforcent de répertorier les mots de savoyard dans leur Dictionnaire savoyard et de codifier la langue pour en faciliter la rédaction.

Au cours des siècles, la langue savoyarde n’a donc pas cessé d’être écrite en vers ou en prose, dans des chansons, des contes, des récits divers. De nos jours, de nombreux auteurs, occasionnels ou non, perpétuent cette tradition dans des concours en vers ou en prose, dans de nombreux dictionnaires, ou dans des œuvres diverses : pièces de théâtre, chanson, romans…

La question de la graphie de nos jours

Deux systèmes d’écriture semblent privilégiés.

  • Une graphie (semi-)phonétique
    Alors que de plus en plus de dialectologues s’intéressent au parlers savoyards au cours de la seconde moitié du XXe siècle, des écritures semi-phonétiques sont proposées. Parce que le matériel d’enregistrement audio était cher et que l’alphabet phonétique international (API) était jugé trop difficile pour les locuteurs, la « Graphie de Conflans » fut proposée à partir de l’alphabet français. La graphie de Conflans a pour vocation de se substituer à l’API et a contribué en Savoie à noter de nombreux parlers (moribonds) en faisant des dictionnaires et en participant à des études de dialectologues (comme comme G. Tuaillon et C. Abry).  

    → Pour en savoir plus : Graphie de Conflans.

  • Une orthographe globalisante (Orthographe de Référence B)
    Une autre modalité d’écriture, une orthographe globalisante, est proposée sous l’égide d’un linguiste, M. Dominique Stich. C’est une orthographe savante qui est une synthèse des écritures utilisées par les écrivains anciens. De par son caractère étymologique, cette orthographe conserve le lien avec les autres langues romanes. Or, cette orthographe est utilisée dans l’enseignement, sur Internet (e.a. Wikipédia, traducteur en ligne) et dans la communication à plus grande échelle (la Région).  

    → Pour en savoir plus : Orthographe globalisante.

Les deux systèmes d’écriture se côtoient en Savoie et l’Institut de la Langue Savoyarde offre à chacun la possibilité d’écrire dans le système d’écriture qui lui convient.