Communiqué de l’Institut de la Langue Savoyarde:

Depuis le 16 décembre 2021, le savoyard est inscrit – sous son nom exonyme de francoprovençal – dans le Bulletin officiel de l’Éducation nationale.¹ Concrètement, cela veut dire que des cours d’arpitan savoyard pourront être enseignés dans les établissements primaire et secondaire sur le territoire français.

Jusqu’aux années 1940 du 20e siècle, le savoyard était très répandu comme langue maternelle dans les Pays de Savoie (Savoie-Mont Blanc). Le français était minoritaire au sein des foyers jusqu’au début du 20e siècle pour finalement devenir largement majoritaire quelques décennies plus tard.

Le savoyard est donc dorénavant l’une des langues régionales qui est officiellement enseignable dans tous les établissements scolaires.

« Cet enseignement peut être dispensé tout au long de la scolarité », peut-on lire dans l’article de loi de 2008 sur les langues régionales. Ce même article indique que l’enseignement facultatif de langue et culture régionale peut prendre deux formes: un enseignement de la langue et de la culture régionale, ou un enseignement bilingue en langue française et en langue régionale.



Une bataille de 70 ans
Tout commence en 1951: la loi Deixonne a permis d’introduire dans le cursus scolaire l’apprentissage de certaines langues régionales (l’occitan, le basque, le breton, le catalan, etc), mais elle ignore le francoprovençal. Il n’est donc pas enseigné.

Le 5 septembre 2001 : la première circulaire relative à l’enseignement des langues régionales est publiée. Basque, breton, catalan, corse… la liste des langues régionales est longue, mais le savoyard n’y figure pas.

Cette absence sera l’une des raisons principales de la création de l’Institut de la Langue Savoyarde en 2005. Pendant des années – en collaboration avec les principales associations défendant la langue comme Lou Rbiolon, l’Association des Enseignants de Savoyard (AES) et la Fédération d’associations de parents d’élèves Savouè Ecoula – ses représentants ont discuté avec les différentes autorités compétentes, dont l’Education nationale.

Finalement, ce sera une commission instaurée par le Premier-Ministre Jean Castex et le Ministère de l’Education nationale qui tranchera 18 ans plus tard et ajoutera en particulier le francoprovençal à la liste des langues régionales inscrites dans une circulaire publiée le 16 décembre 2021.

Après avoir soutenu des pétitions, écrit des lettres et participé à divers manifestations, l’Institut de la Langue Savoyarde s’est longuement battu pour arriver à cette reconnaissance.

« Le gouvernement et le ministère de l’Education Nationale ont compris et fini par accepter l’inscription de l’arpitan, ou bien le francoprovençal, dans la circulaire réécrite. », se réjouit Arnaud Frasse pour l’ILS. « C’est une forme de soulagement. On n’a pas faibli pendant 16 ans. Ça a été un bel exemple de travail associatif, pédagogique et politique. Une belle démarche humaine. On ne compte plus le nombre de démarches qui ont été effectuées. Tant que la langue n’était pas inscrite, c’était compliqué. Nous tenons à remercier tous ceux qui se sont impliqués dans les différentes actions ces dernières années pour réaliser cet objectif: les locuteurs de la langue, les élèves, les parents d’école, les élus et tous ceux qui soutiennent notre cause pour apprendre le savoyard à l’école. Nous tenons tout particulièrement à féliciter l’enseignant Marc Bron pour ce résultat; il a beaucoup travaillé en tant que président de l’AES et co-fondateur de l’ILS pour y parvenir. »

« Après toutes ces années, je n’arrive toujours pas à réaliser que notre langue a enfin été reconnue par le ministère de l’Éducation nationale. » dit Marc Bron avec une grande joie.

Pour que vive nos langues

Prochaines étapes?

« Recruter des professeurs, mais ce n’est pas tout. Il faut aussi mettre sur pied un conseil académique des langues régionales qui prend en compte notre langue dans le cadre officiel du francoprovençal², rédiger une convention État-Région et créer un Office public des langues d’Ouè. » explique Arnaud Frasse.


Notes:
¹. Le linguiste italien Graziadio Isaia Ascoli (pas originaire de la zone linguistique) donne le nom exonyme « franco-provençal » à la langue en 1873. Les (propositions d’) endonymes que l’on rencontre en France sont « arpitan », « langue d’Ouè », « savoyârd » ou « patouès ».

². Jusqu’à présent, les élèves qui voulaient passer l’option langue régionale du baccalauréat en francoprovençal, devaient s’inscrire à l’option occitan.